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Histoire d’une femme libre de Françoise Giroud

Histoire d'une femme libre de Françoise Giroud

On ne présente plus Françoise Giroud, sa plume acérée, son professionnalisme, son exigence, son intransigeance aussi parfois. C’est en janvier 2013, dix ans après sa mort, qu’est sortie cette Histoire d’une femme libre, exhumée des archives de l’Institut Mémoires de L’Édition Contemporaine (IMEC) où l’auteur et journaliste l’y avait déposée. 53 ans plus tard, le manuscrit renaît de ses cendres. Que raconte Françoise Giroud ? Sa vie, de 1916 à 1960, année de son suicide raté, malgré toutes les précautions qu’elle avait prises pour que personne ne la tire de l’au-delà. 44 ans de vie intense, miséreuse, exaltante, dangereuse, douloureuse, de ses premières années passées avec sa mère, sa sœur et sa grand-mère jusqu’à cet instant où Jean-Jacques Servan-Schreiber, avec qui elle a créé l’hebdomadaire L’Express en 1953, la remercie sans états d’âme, l’accusant de mille maux. De là, sa décision de disparaître, après sept années de labeur effréné. Si le récit de Françoise Giroud mêle la grande histoire à la sienne – de ses actes de résistance pendant la Seconde Guerre mondiale au soutien sans faille qu’elle apporta à Pierre Mendès France à travers L’Express en passant par la guerre d’Algérie -, ce n’est pas ce qui fait réellement l’intérêt de ce livre. Car cette histoire là est déjà connue, au moins pour ceux qui – comme moi – se sont intéressés à cette grande femme. Non, l’intérêt de ce livre réside dans ce qu’elle dit, sans fard, de l’amour qu’elle porte à JJSS, homme brillant, visionnaire, mais totalement égo-centré, qui semble n’aimer les autres que pour l’amour qu’ils lui portent. Un livre touchant et une écriture alerte, comme toujours.

Extrait, page 114 : « Un homme, pour moi, ce n’est ni un portefeuille pour assurer mon existence, ni une étiquette dont j’ai besoin pour circuler dans la société, ni un bijou qu’il m’amuserait de porter pour que d’autres me l’envient, ni un sexe où accrocher mon reste de jeunesse pour la retenir, ni un poste à transistor destiné à combler le silence.

C’est un être humain avec lequel je veux trouver ce qu’il y a de plus rare au monde : un langage commun. Communiquer, s’entendre, être entendu et entendre l’autre.

Ce langage est fait de mots et aussi de gestes, bien sûr. On peut commencer par les gestes ; on peut commencer par les mots ; on peut réussir dans les gestes et pas dans les mots, dans les mots et pas dans les gestes. Dans ce cas-là, c’est raté et c’est affreux, parce qu’il arrive qu’on boite longtemps à deux, au lieu d’avoir le courage de reprendre le chemin seul.

On peut aussi se tromper un temps. Qui de nous ne s’est trompé ? En vous parlant, je me souviens d’un bel imbécile aux yeux verts… Non, je préfère ne pas m’en souvenir. Être absorbée par un homme au corps intelligent et à l’esprit obtus, fût-ce pendant deux mois, c’est la punition suprême.

Quand on a trouvé, il faut encore garder la communication toujours ouverte au niveau le plus profond, et ce n’est pas simple » Françoise Giroud.

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