Sur les planches

Ruy Blas

Pièce de Victor Hugo écrite en 1838, mise en scène par Christian Schiaretti

Bien que fort célèbre, je ne connaissais pas la pièce en cinq actes écrite par Victor Hugo. Ou plutôt si, mais à travers la vision comique de Gérard Oury dans son film La folie des grandeurs. L’histoire est simple : don Salluste, politicien espagnol, se voit chassé par la reine pour avoir abandonné sa servante après lui avoir fait un enfant. Condamné à l’exil, il a cependant le temps, juste avant de s’éclipser, d’ourdir un complot contre la reine, en instrumentalisant son laquais Ruy Blas, qu’il sait amoureux de cette dernière. Ruy Blas prendra donc la place de don César, le neveu de don Salluste. Voilà pour l’intrigue. Côté acteurs, Ruy Blas est servi par des acteurs magistraux, dont Robin Renucci dans la peau du sinistre don Salluste et Nicolas Gonzales, jeune acteur de la troupe du TNP, dans celle de Ruy Blas. Pour jouer don César, l’excellent Jérôme Kircher dont l’interprétation d’un seigneur déchu, qui a choisi de vivre avec les gueux, est à la fois drôle et touchante. Le tout donne une pièce de trois heures magnifiquement bien menée, alerte, aux accents comiques que n’aurait sans doute pas renier Gérard Oury. En filigrane, l’histoire d’une Espagne exsangue, pillée par ses seigneurs qui n’ont que mépris pour le peuple qu’ils saignent. Etrange modernité dans le climat économique et social actuel. Le public ne s’y est pas trompé hier. Le TNP, entièrement rénové après quatre ans de travaux, était plein. La « standing ovation » était amplement méritée.

Pour le plaisir une tirade de Ruy Blas. Que la langue française est belle !

Acte III, scène II, Ruy Blas s’adressant à la junte du Despacho Universal (conseil privé du roi) :

« O ministres intègres !

Conseillers vertueux, voilà votre façon

De servir, serviteurs qui pillez la maison !

Donc vous n’avez pas honte et vous choisissez l’heure,

L’heure sombre où l’Espagne agonisante pleure !

Donc vous n’avez ici pas d’autres intérêts

Que d’emplir votre poche et vous enfuir après !

Soyez flétris, devant votre pays qui tombe,

Fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe !

Mais voyez, regardez, ayez quelque pudeur,

L’Espagne et sa vertu, l’Espagne et sa grandeur,

Tout s’en va. – Nous avons, depuis Philippe Quatre,

Perdu le Portugal, le Brésil, sans combattre ;

En Alsace Brisach, Steinfort en Luxembourg ;

Et toute la Comté jusqu’au dernier faubourg ;

Le Roussillon, Ormuz, Goa, cinq mille lieues

De côte, et Fernambouc, et les Montagnes-Bleues ! »

Victor Hugo.

En bonus, la chronique de Vincent Josse sur France Inter le 18 novembre dernier à propos de Ruy Blas et du TNP. C’est à écouter à cette adresse :

christian-schiaretti-sur-france-inter-3449#more-3449

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